Avant de faire sa thèse en modélisation des débris spatiaux à l’Agence Spatiale Européenne et à l’Institut de Mécanique Céleste et de Calcul des Ephémérides, Fatoumata Kebe a dû affronter seule des obstacles apparemment insurmontables : dans son lycée à Noisy-Le-Sec, ses professeurs ne croyaient pas en elle, ses parents (qui auraient préféré qu’elle travaille au lieu de faire des études) et la discrimination insidieuse qui règne dans le milieu de la recherche scientifique.
Elle est adolescente lorsque naît sa vocation
« Mon père avait acheté des livres de sciences, dont un d’astronomie, j’ai vu des photos d’étoiles et c’est ça qui m’a donné envie, je me suis dit : plus tard, je travaillerai dans l’astronomie. Dans le 93, on ne pense pas à l’astronomie. Je me suis présentée toute seule à un petit concours d’astronomie qui s’appelait l’envol, en arrivant au concours, j’ai découvert que tous les autres participants étaient soutenus par leurs lycées et leurs professeurs, moi j’étais toute seule. »
Arrivée en classe de Terminale, Fatoumata se heurte au blocage de l’un de ses professeurs
« Je voulais faire une prépa scientifique mais mon professeur de mathématiques pensait que c’était un impossible pour une étudiante du 93, il ne croyait pas en moi et m’a fait un super mauvais dossier. Par dépit, je me suis inscrite à l’Université. » Pour financer ses études, Fatoumata enchaîne les petits boulots au risque de s’épuiser et de se décourager. »J’ai travaillé en restauration à Disney, comme équipière chez Mac Do… »
Loin de la soutenir, ses parents ne comprennent pas la vocation de leur fille
« Pour mes parents, les études ça ne veut rien dire. Pour eux, le but c’est d’avoir un travail qui permet de payer ses factures et de vivre de manière correcte. Quand je leur ai parlé d’astronomie, ils n’ont pas pensé à la difficulté, ils m’ont dit : « ça sert à quoi ? »
Fatoumata est confrontée à la discrimination au sein même de l’institution qu’elle a intégrée
« Quand je suis arrivée à l’Observatoire de Paris, même au bout de plusieurs mois, on me prenait pour la standardiste. Pour eux, c’était impossible que je puisse être doctorante à l’Observatoire de Paris. On me disait aussi : comment tu peux avoir une meilleure note que moi alors que tu viens du 93. Si tu es douée c’est parce que tes parents viennent du Mali et que les Dogons avait une grande culture astronomique. Mais ça n’a rien à voir ! Nous ne sommes même pas de l’ethnie dogon. »
En décrochant deux bourses de la Fondation Vocation et de la Fondation Tomato, Fatoumata trouve enfin le soutien qui avait tardé à venir. Fatoumata a décidé elle aussi de s’engager pour faire connaître l’astronomie à d’autres jeunes issus des classes populaires. Guide à l’observatoire de Paris, elle a créé l’association Éphémérides pour rendre la visite accessible à tous, une manière de susciter de nouvelles vocations…
Avec sa thèse, Fatoumata travaille déjà à l’écologie du futur
Rencontre avec Fatoumata Kebe grâce à l’événement W(e) talk (women empowerment event) qui a donné la parole à des femmes exceptionnelles venues raconter leur parcours en public pour encourager d’autres femmes à oser exercer le métier dont elles rêvent…